Sophie (fake name, of course) est informaticienne, employée depuis 2 ans dans une dynamique petite entreprise du nuage, comme dirait l'autre. Ce matin-là, elle a pris son courage à deux mains pour utiliser la Ressource Agathe, dans le paysage de l'équipe depuis des années et plus ou moins sollicitée.
"Je me sens comme une plante verte, je parle de moins en moins en réunion et j'ai l'impression de ne pas compter en fait, je me sens ultra seule alors qu'on passe nos journées connectés. Je n'arrive plus à me motiver, je commence à détester mon boulot alors que je m'éclatais dans mon domaine."
Lourd! On creuse. On s'équipe: pelle et courage, et on creuse.
-Comment ça feel physiquement, ce qu'elle me raconte? oppression, mal au ventre, pas envie de se lever, chaud et emmerdoyé dans la gorge, là
-Et comment elle se sent du coup? (je vous le fais en accéléré) ... un bébé, une débutante, une Stagiaire! (il faudrait que j'écrive un post sur le complexe de la Stagiaire)
-Qu'est ce qu'elle voudrait, au fond? faire du Python (je décroche l'espace d'une seconde mais je me contrôle), qu'on lui fasse confiance, que les demandes lui soit adressées à elle quand c'est elle qui est d'astreinte; qu'elle retrouve le sourire, l'intérêt, comme avant quoi.
-Y a t il eu un moment de gel, un coup de blizzard de fou qui marque un avant et un après? (of course there was, on l'attrape, un moment bête où sentiment de trahison et honte ont marqué au fer le tissu de ses relations avec un membre de l'équipe. Depuis, ils font l'un et l'autre comme si c'était de l'histoire ancienne - mon oeil.)
-Si elle pouvait, elle ferait quoi? elle dirait ses 5 vérités, mais bon, elle ne peut pas, elle risquerait de pleurer...
Thanks Mom!
Nous y voilà. A mon sens, de nombreux facteurs peuvent expliquer la lente dégradation de la situation et la perte de confiance en pente pas douce de Sophie:
Listons:
-Sophie est une fille
-Sophie a 26 ans
-C'est son premier job
-Les 3 collaborateurs informaticiens de Sophie ne sont pas des filles
-Les 3 collaborateurs informaticiens de Sophie ont 43*2 et 32 ans. Les deux quadras sont dans la boite/place depuis 10 ans.
-Sophie vit en France en 2021, les bureaux sont vides et les opportunités de crever les abcès interpersonnels qui font la sel de la vie de bureau se font de plus en plus rares...
-Etc...
A mon sens toujours, un seul facteur paralyse Sophie et la transforme en victime: la peur de pleurer, et d'en être jugée.
Il y a fort longtemps, la maman de Sophie lui a expliqué que pleurer c'est être faible, alors pleurer au boulot c'est... d'une innommable médiocrité, se rendre minable, s'exposer au pire. Sophie dépense donc une énergie folle à écrabouiller et ses émotions et ses mots, elle évite soigneusement de seulement essayer d'adresser le problème de collaboration dont elle se sent victime, pour ne pas se montrer vulnérable.
Et pourtant, oui, elle a déjà vu au moins une de ses collaboratrices émue aux larmes, (trop plein de stress, besoin d'évacuer, conversations cruciales et compliquées, courage de donner on recevoir un feedback qui touche au coeur...) Et du coup, est-ce qu'elle la méprise? Non! Cette fille-là est en position de leadership dans l'entreprise, on l'écoute. On l'admire. Ouf.
Licence to cry
Pour moi, pleurer au boulot, ça devrait se célébrer! c'est un milestone, pas forcément sur la route de chacun, mais de certains. C'est un signe de courage, de maturité, d'envie de contribuer. Si on pleure, c'est pour arriver à parler, à dire sa perspective. Ca bouchonne, on fait avec, nous les sensibles!
En fait c'est simple, si on en fait tout un plat et qu'on se contrôle pour qu'aucune émotion ne sorte ou ne monte, on va aussi assez naturellement se taire, éteindre sa voix; pour ne pas prendre de risque.
Avis aux taiseuses, et aux taiseux.
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